OULIPO 2

 


 VOICI L’OULIPO

FRANCOIS CARADEC


 Voici l’oulipo que François Le Lionnais a créé.

 Voici les joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

 Voici les livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

 Voici les éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

 Voici les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

 Voici les comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le    Lionnais a créé.

 Voici les jolies secrétaires des comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo  que François Le Lionnais a créé.

 Voici les enfants des jolies secrétaires des comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres  de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

Voici les nouveaux oulipiens que deviendront les enfants des jolies secrétaires des comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

Voici les travaux des nouveaux oulipiens que deviendront les enfants des jolies secrétaires des comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

Voici les lecteurs des travaux des nouveaux oulipiens que deviendront les enfants des jolies secrétaires des comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

Voici les lunettes des lecteurs des travaux des nouveaux oulipiens que deviendront les enfants des jolies secrétaires des comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

Voici les opticiens qui ont vendu les lunettes des lecteurs des travaux des nouveaux oulipiens que deviendront les enfants des jolies secrétaires des comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

Voici les propriétaires des magasins des opticiens qui ont vendu les lunettes des lecteurs des travaux des nouveaux oulipiens que deviendront les enfants des jolies secrétaires des comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

Voici le pompier qui éteint le feu chez les propriétaires des magasins des opticiens qui ont vendu les lunettes des lecteurs des travaux des nouveaux oulipiens que deviendront les enfants des jolies secrétaires des comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

Voici la fiancée du pompier qui éteint le feu chez les propriétaires des magasins des opticiens qui ont vendu les lunettes des lecteurs des travaux des nouveaux oulipiens que deviendront les enfants des jolies secrétaires des comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

Voici le gendarme qui est le frère aîné de la fiancée du pompier qui éteint le feu chez les propriétaires des magasins des opticiens qui ont vendu les lunettes des lecteurs des travaux des nouveaux oulipiens que deviendront les enfants des jolies secrétaires des comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

Voici la femme du colonel du gendarme qui est le frère aîné de la fiancée du pompier qui éteint le feu chez les propriétaires des magasins des opticiens qui ont vendu les lunettes des lecteurs des travaux des nouveaux oulipiens que deviendront les enfants des jolies secrétaires des comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

Voici les grands enfants de la femme du colonel du gendarme qui est le frère aîné de la fiancée du pompier qui éteint le feu chez les propriétaires des magasins des opticiens qui ont vendu les lunettes des lecteurs des travaux des nouveaux oulipiens que deviendront les enfants des jolies secrétaires des comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.

Voici les amis qui accompagnent les grands enfants de la femme du colonel du gendarme qui est le frère aîné de la fiancée du pompier qui éteint le feu chez les propriétaires des magasins des opticiens qui ont vendu les lunettes des lecteurs des travaux des nouveaux oulipiens que deviendront les enfants des jolies secrétaires des comptables qui établissent les relevés annuels des éditeurs des livres où sont imprimés les travaux des joyeux membres de l’Oulipo que François Le Lionnais a créé.



 FROMAGE OU DESSERT

FRANCOIS CARADEC


Que vais-je dire ?

Par où commencerai-je ?

Souvenir, souvenir, que me veux-tu ?

Ne vois-tu pas que le jour passe ?

Est-ce une vie antérieure qui me poursuit de ses parfums ?

Qui nous guérira de vivre ?

Quelqu’un va-t-il prendre enfin la défense de l’infini ?

Qui es-tu ? Grand Dieu, pourquoi suis-je moi ?

Qu’ès aco ? Quid novi ? Pourquoi warum ?

Est-ce que tu n’en as pas assez d’être une hachure entre les hachures ?

Est-ce toi grand-père est-ce toi tonton ? Où suis-je ? Quelle heure est-il ?

Pourquoi rouvrir, à une page quelconque, avec un empressement blasphématoire, l’in-folio des misères humaines ?

Que songes-tu, mon âme emprisonnée ?

Pourquoi me dites-vous cela ?

Pourquoi pas ?

 

 


HAÏKU-KU LA PRALINE

HERVÉ LE TELLIER


Mon petit garçon

Tu es mon petit garçon

Mon petit garçon

 


WHAT A MAN !

GEORGES PEREC

OH L’OSTROGOTH !

JACQUES JOUET

CE FÊLE DE MEC

OLIVIER SALON


 
Smart à falzar d’alpaga, frac à rabats, brassard à la Franz Hals, Chapka d’astrakan à glands à la Cranach, bas blancs, gants blancs, grand crachat d’apparat à strass, raglan afghan à falbalas, Andras MacAdam, mâchant d’agaçants partagas, ayant à dada l’art d’Allan Ladd, cavala dans la Pampa. 

Long short snob, snow-boots, poncho oblong, pompon confort Pontormo, frony chromo Pollock, khôl, col blond, dos blond, long cordon d’or toc, froc d’Oxford folklo, Doc’ Job mord son hot dog. Trot prompt, groos modo john Ford.

C’est l’été. En béret, spencer en stretch pervenche, veste de tweed empesée genre Hermès et revers de tweed, bretelles crème, vêtement percé de perles grèges, semelles de crêpe légères, Serge est en Grèce.

Passant par là, par hasard, marchand à grands pas, bras ballants, Armand d’Artagnan, crack pas bancal, as à la Sana A, l’agrafa. Car, l’an d’avant, dans l’Arkansas…FLASH-BACK !

Or donc, Tom Von Porthos, gros porc monobloc, zozo bon fond look Pol Pot, mord Doc’ job.

Trop tôt! Stop chrono! Sondons nos dos, gnomons don’t on sort! Togo…

Serge rêve de belles femmes, de déesses et d’êtres de légende, tels Hélène, Hermès, Egée, Thésée et Enée. Bref, Serge recherche Hélène et les mecs ! Ses errements le mènent en Crète. Près des cendres de Médée, Serge repère Greg, bel éphèbe, genre berbère, et le hèle. Hep !

Caramba ! clama Max.-          Pas cap ! lança Andras.-          Par Allah, t’as pas la baraka ! cracha Max.-          Par Satan ! bava Andras.

Ho ! mon colon, sort Otto.-          Poltron ! pond Doc’ Job . Montons !-          Thor ! Confrontons nos rognons ! (Propos d’Otto.)-          Moloch ! (Doc’ Job tord son ton.)

En Effet, l’été précédent, en Crète, Serge se le remet en tête.

Greg le Grec (de Delphes) et Serge l’Helvète ( de Genève) se présentent. D’emblée, Greg se révèle revêche.

-          Défense d’entrer, c’est fermé, décrète le Grec, pète-sec.

-          Permets, tempère Serge embêté, je vénère et même révère des gens célèbres de Crète.

-          Respecte le règlement, reprend sèchement Greg.

-          Je gêne réellement ? émet Serge, vexé.

-          Enlève tes semelles de mes terres, jette Greg, véhément.

-          Je reste, et même j’entre, s’entête Serge.

Match pas banal : Andras MacAdam, campagnard pas bavard, bravant Max Van Zapatta, malabar pas marrant.

Ca barda. Ca castagna dans la cagna cracra. Ca balafra. Ca alla mal. Ah la la ! Splatch ! Paf ! Scratch ! Bang ! Crac ! Ramdam astral !

Choc rococo : Doc’ Job, homio snob, mord Otto von Zorro, gros coq fort…

On mord, on tord, on fond… crocs, polonchons, flocons, plombs, corps, tronçons, stock d’os bororos, nonos, gros colons, roploplots… Oh pop o po! Pof! Toc! Plonk! Bof! Tchoc! Cosmos tors.

 Mésentente sévère.Greg s’énerve et enfle ses gestes.-          Serge me cherche, ce me semble…-          Des nèfles !-          Espèce de kleenex, je te jette.
-          Je t’emmerde !-          Vénère !

 Max planta sa navaja dans l’avant-bras d’Andras. Ca rata pas.-          Ca va pas, fada ! brama Andras, s’affalant à grand fracas.Max l’accabla.

-          Ha ! Ha ! Cas flagrant d’asthma sagrada ! Ca va à part ça ?-          Bâtard vachard ! Castrat à la flan ! râla Andras, blafard.

Hors propos, Otto mord Doc’ job (son zob). Bon.

Ho, mollo! (Doc’ Job’s solo pro domo).

Non-stop, Otto pond son ton grognon:

Dors, dors donc, pronto! Photo, mon coco ?

Pff… Gros con ! Gogo ! sort Doc’ Job, mol.

Leste, Greg prend le revers de veste de Serge et tente de l’éjecter. Les bretelles cèdent. Serge rentre le ventre et serre les fesses. De ses dents, ce fêlé de Greg perce les lèvres et le nez de Serge.

-          Descend en enfer, tempête Serge excédé, les lèvres enflées.-          Reste et végète en géhenne, bêle Greg.Le grec perd les nerfs et tente d’étêter Serge.

-          Serpent délétère !-          Ver de terre en germe !-          Chèvre dégénérée !-          Chevêche échevelée !-          Clebs en déshérence !-          Crevette desséchée !

-          Teckel breveté !-          Bête entre les bêtes !-          Tempête terrestre.

Bang ! Bang ! Andras MacAdams cracha sa valda.Max l’attrapa dans l’baba, flancha, flagada, hagard, raplapla.Par Achab, Maharajah d’Al-Kantara, va à Barrabas ! scanda Andras.Alas, halas ! ahana Max, clamçant. 

Pop! Pop! Doc’ Job sort son bonbon. Otto tord son corps, son torchon. Bobo, gros bobo… Mort.Ô, Booz! Go to Toronto! Sort Doc’ Job.

So long, so long! Sort Otto… mort.

Greg le pervers jette des pêches, des vertes et des blettes.

Serge serre très fermement, presse extrêmement les tempes de Greg.

Cette défense est sensée, et Greg perd lentement ses repères.

Les membres enchevêtrés, Greg est renversé pêle-mêle.

En détresse, le blessé reprend :

Esthète éméché, j’espère te démembrer et t’édenter, te défenestrer, t’éventrer, te crever et perdre tes cendres.

Expert éthéré, j’entends te décérébrer, t’étêter, te pendre et t’enterrer.

Je t’exècre, excrément d’exégète !

Je te déteste, déchet écervelé de Crète !

Redescend vers Genève, détergent fermenté !

Espèce de Prévert en gelée !

Blême, Greg tente de se redresser.

Désespéré, le grec ne cesse de trembler, s’étend, desserre lentement les lèvres, émet entre ses dents :

« Espèce de Revenent déréglé de chez Perec »

et décède prestement.

 


 NOTRE AUBER

HERVE LE TELLIER


 Notre Auber qui êtes Jussieu

Que Simplon soit Parmentier

Que Ta Volontaires soit Place des Fêtes

Que Ton Rennes Arrive

Sur Voltaire comme Courcelles

Donne-nous Galliéni notre Havre-Caumartin

Et ne nous soumets pas à la Convention

Cambronne-nous nos défenses

Comme nous Odéons à ceux qui nous ont Maraîchers

Délivre-nous des Halles.

Miromesnil.




 COLLECTION D’ANTONOMASES

HERVÉ LE TELLIER


Statue du géant Atlas complètement perdu en banlieue nord, et incapable de replier une carte routière.

 




Héliographe en couleurs véritables d’Eugène Poubelle, devant son immeuble, ses ordures ménagères dans une main, et se demandant où les mettre.






Buste de Joseph Guillotin, consultant un médecin pour un torticolis.


 



Photographie représentant Franz Kafka se faisant expliquer la procédure à suivre pour se faire rembourser une note de frais par l’Éducation nationale.






Statue du dieu Hermès trouvant un ouvrage d’alchimie absolument incompréhensible et décidant de se lancer dans la maroquinerie.

 


Photographie de Louis Braille écrivant à Samuel Morse qu’il n’a pas vu depuis longtemps.






Retable du XIII° siècle montrant notre seigneur Jésus-Christ en visitation à Lyon et décidant de goûter le saucisson.






Eau-forte représentant François-René de Chateaubriand décidant brusquement de mettre un terme à son régime végétarien.

 




Vase grec en bas-relief représentant Platon faisant clairement comprendre à une jeune femme qu’il reste malgré tout de bois.






Buste d’Alexandre le Grand déclamant un poème à sa propre gloire en vers libres, et se demandant si on ne pourrait pas trouver mieux.

 




Statue en marbre rose de Titus Flavius Vespasianus, saisi en plein Rome d’une irrépressible envie de pisser.





 Icône représentant Judas regardant par un trou dans la porte pour voir si ce ne serait pas Jésus qui aurait frappé, par hasard.





Huile représentant Joseph de Montgolfier buvant un petit ballon au bistrot avec son frère Étienne.



 

JOCONDE JUSQU’À 100

HERVÉ LE TELLIER


                        Le point de vue de Zazie :

 -          Pourkoikelsouri ? dit Zazie

-          J’en sais rien, moi, pourquoi, dit Gabriel. Tu peux pas admirer tranquillement comme tout le monde ?

-          La Joconde, moi, je m’en tamponne le coquillard, c’que je voulais, c’était prendre le métro.

-          Le métro, le métro, arrête un peu avec ton métro, on t’a dit qu’il est grève. Et puis c’est pas dans le métro que tu verras un joyau de l’art gothique comme la Joconde.

-          Joconde, mon cul.

-          Bon mon cochon, dit Charles, elle a de la conversation, ta nièce.

 

Le point de vue du médecin :

 Femme de vingt-six ans. Surcharge pondérale légère. Trois maternités, la dernière avec complications. Se plaint de fréquentes douleurs articulaires, surtout, au poignet droit. Confesse une légère aérophagie. Un peu d’hypertension.

Carbosylane : une fois par jour.

Anorex : Une gélule matin et soir pendant quinze jours.

 Rendez-vous dans un mois.

 

             Le point de vue de Melle Mona :

 Humm… mon nez. J’ai le nez qui me démange. Si je bouge les mains pour me gratter, je n’arriverai jamais à les remettre exactement comme il les voulait. Il est tellement maniaque. Vite, vite, pendant qu’il ne voit pas. (Elle se frotte le nez énergiquement.) Ah … ça fait du bien… Zut, j’ai encore envie de faire pipi. C’est le thé… Je n’aurais pas dû reprendre. – Maître ? Maître ? Pouvons-nous faire une petite pause, Maître ?

-          

-          h, très bien… À demain, alors.

-          

-          Oui, Maître, demain, j’essaierai de sourire.

 

 Le point de vue de Radio-Londres :

 « Mona Lisa n’a pas envie de rire… »

Je répète :

« Mona Lisa n’a pas envie de rire… »

 

 Le point de vue du fabuliste :

La Joconde et la Vierge à l’Enfant

La Joconde, ayant posé tout l’été,

Se trouva fort dépourvue

Lorsque la crise du marché de l’art fut venue.

Pas la moindre séance de pose

Aux Beaux-Arts ou même des photos.

Elle alla crier famine

Chez la Vierge à l’Enfant sa voisine.

La priant de lui prêter

Quelque pain pour subsister

Jusqu’à la saison nouvelle.

Je vous paierai, lui dit-elle,

Avant l’Out, foi de modèle,

Intérêt et principal.

La Vierge à l’enfant n’est pas prêteuse.

C’est là son moindre défaut.

-          Que faisiez-vous au temps chaud ?

Dit-elle à cette emprunteuse.

-          Je posais, ne vous déplaise.

-          Vous posiez ?

J’en suis fort aise.

Et bien, peignez maintenant.

 

Le point de vue de l’avocat :

 Mesdames et messieurs les jurés, Monsieur le Président, cette femme assise devant vous, encore râpée dans ses habits de deuil, n’est pas une meurtrière ? Non, monsieur l’avocat général, son sourire n’est pas l’hideux rictus d’un monstre sans remords. C’est le pauvre sourire d’une femme seule et blessée, qu’une trop longue procédure a portée au bord de la déraison. Ces mains croisées, immobiles, ne sont pas la preuve d’une froide insensibilité. Elles témoignent au contraire d’une sérénité que seule peut offrir l’innocence.

Mesdames, messieurs les jurés, Mona Lisa n’a que trop souffert de cette longue préventive. C’est pourquoi je vous demande d’acquitter la Joconde.

  

            Le point de vue de Georges Perec :

 Je me souviens de « C’est moi qui suis la Joconde, la Joconde, la Joconde », chanté par paul Brafford (de l’oulipo).

Je me souviens que la Joconde est une huile sur bois, et non une huile sur toile.

Je me souviens que, selon le peintre Henri Cueco, le tableau de Courbet, L’Origine du Monde, qui représente un sexe de femme, est la partie inférieure d’un diptyque dont le haut est la Joconde.

Je me souviens que Marcel Duchamp a dessiné des moustaches et un bouc à la Joconde, avant d’écrire en dessous, en toutes lettres, L.H.O.O.Q.

Je me souviens d’un poster qui représentait Mona Lisa en train de fumer un joint.

Je me souviens de « Mona Lisa Klaxon au téléphone », de Jacques Higelin.

Je me souviens que Marina Vlady est le sosie de Mona Lisa dans le film de Michel Deville, On a volé la Joconde.

Je me souviens que, comme disait Pierre Dac, « c’est en sciant que léonard devint scie »

Je me souviens que dans Je me souviens, de Georges Perec, il n’est jamais fait allusion à la Joconde.

            Le point de vue de jules César :

 Veni, vidi, Vinci*

*Je suis venu, j’ai vu la Joconde.

     

                   Le point de vue des tontons flingueurs :

 -          Ta Mona, elle m’est sympathique, mais elle commence à me les briser menu avec son sourire d’oie sacrée. Ou elle s’arrête de poser, la Madone, ou je lui en colle une à lui faire envisager le panorama qu’elle a dans le dos.

-          Calme-toi, Riton, tu te fais du mal.

-          Tiens, si c’était pas la gonzesse à Léo, c’est en plusieurs colis que je te la réexpédierais à Florence et à ses Gondoles.

-          Fais zexcuse, Riton, mais sans vouloir te vexer, ya gourance, les gondoles, c’est Venise, pas Florence.

-          Oh, mai c’est que je vais me le décalquer aussi, le petit singe savant.

 

 Le point de vue de 007 :

 -          Ne nous sommes-nous pas déjà rencontrés, Monsieur ?

-          Cond, My name is Cond. Joe Cond.

 

Le point de vue des tontons flingueurs 2 :

 -          Sans être franchement malhonnête, elle est assez curieuse. On a dû arrêter les visites. Y’en a qui devenaient aveugles.

-          Ah faut reconnaître, c’est du brutal.

-          J’y trouve une touche d’ocre.

-          Y’en a.

-          Tu sais pas c’qu’y m’rappelle ? cette espèce de diptyque qu’on voyait dans un musée de Bien-hoâ, pas loin de Saigon. Et l’artiste, déjà, comment qu’y s’appelait, nom de Dieu !

-          Le Titien.

-          T’as connu ?

(Entre une jeune fille, qui s’approche du tableau)

-          Touche pas au châssis, salope !!

(Effrayée, la jeune fille sort de la salle)

-          D’la peinture à cet âge-là !

-          Il avait son secret, Léo. 50 kg de modèle, un bois verni, et il te sortait un chef-d’œuvre trois étoiles au pinceau. Et c’est pour ça que je me permets d’intimer l’ordre à certains salisseurs de mémoire qu’y feraient mieux de fermer leur gueule.

-          Z’avez beau dire… Y’a pas seulement de l’ocre. Y’a autre chose. Ce serait pas des fois de la terre de sienne ?

-          Y’en a aussi.

-          Faut quand même admettre que c’est plutôt un tableau d’homme.

 

 

 

L'AUTRE SONNET

PAUL FOURNEL


Sonnet homophonique        CHŒUR : SONNET, PETIT SONNET

Sonnet pas la peine

Sonnet pas important

Sonnet pas grand-chose

Sonnet pas rien

 Sonnet pas grave

Sonnet pas sérieux

Sonnet pas nécessaire

Sonnet pas l’heure

 Sonnet pas trop fameux

Sonnet pas bien méchant

Sonnet pas la mère à boire

Sonnet pas lui

Sonnet pas moi

Sonnet l’autre


 

LES BREBEATLES

HERVE LE TELLIER


Dans le zoo de Liverpool,

entre Abbey road et Penny Lane,

MATILDE ET CLOTILDE CHANTENT

on peut admirer la laine

de quatre ovins dans le vent.

Ce sont les brebeatles,

CHŒUR : yeah, yeah, yeah.

Les brebeatles ont les poils longs,

et bêlent de jolies chansons :

CHŒUR : (sur l’air de Imagine)« Imagine qu’il n’y ait pas d’enclos,

pas de gardien, et pas de zoo »,

et avec eux, les animaux font

CHŒUR : « Obladi » et « Oblada ».

Les brebeatles mangent tant d’herbe

qu’ils croient parfois voir dans le ciel

Lassie avec des diamants.

(LE CHŒUR CHANTE LASSIE IN TEHE SKY WITH DIAMONDS

Ce sont les brebeatles,

CHŒUR :yeah, yeah, yeah.



IL PLEUT (pièce logique)

JACQUES ROUBAUD


Je crois qu’il pleut, mais il ne pleut pas.

Tu crois qu’il pleut et tu affirmes qu’il ne pleut pas ?

Oui.

Je crois qu’il pleut mais je sais que je me trompe.

Comment le sais-tu ?

Là n’est pas la question. La question est : je crois qu’il pleut,

Mais j’ai tort.

Qui dit que tu as tort ?

Moi.

Mais si tu as tort de croire qu’il pleut,

Si tu sais que tu as tort de croire qu’il pleut

Comment peux-tu croire qu’il pleut ?

Répondez sincèrement.

Il pleut ?

CHŒUR : Non.

Vous voyez ! 

Je vois qu’il ne pleut pas.

Mais je ne vois pas comment tu peux dire que tu crois qu’il pleut

Et comment tu peux dire en même temps que cette croyance est erronée.

Mathilde : Je ne peux pas le croire.

Je crois que je crois qu’il pleut et je sais qu’il ne pleut pas.

CHŒUR : Bien.

Si je crois que je crois ce que je crois, je le crois.

CHŒUR : Bien.

Personne ne crois que et en même temps que ne pas.

Que quoi ? Que ne pas quoi ?

N’importe quoi : qu’il pleut, par exemple. Bon.

Si je crois que je crois à tort qu’il pleut, 

Autrement dit si je crois qu’il pleut bien que ce ne soit pas le cas,

Il s’ensuit que je crois que je crois qu’il pleut

Et il s’ensuit alors que je crois simultanément qu’il pleut

Et qu’il ne pleut

Pas. Mais puisque personne n’a jamais cru en même temps qu’ il pleuvait et qu’il ne pleuvait pas, il est impossible que je croie que je croie que je crois qu’il pleut

Tout en sachant qu’il ne pleut pas.

CHŒUR : En effet.

Et pourtant je le crois.

CHŒUR : Tu crois quoi ?

      De toute façon, il pleut.




 LE SOUVENIR DE JEAN QUEVAL

FRANCOIS CARADEC


 Il pleuvait.    Je vis entrer Jean Queval....

 

dans un cabriolet de la rougeur du bain,

dans le cachalot de la roulure du baigneur,

dans le cache sexe de la roussette du bagnard,

dans la cacique de la routine du bafouillage,

dans le cadeau de la royauté du badaud,

dans le cadre de la rubrique du bacille,

 

dans un petit café de la rue du Bac

Il portait, je le revoit encore,

 

sur le tentacule une vaccination,

sur la tératologie une vacuité,

sur la terminaison une vaginite,

sur la terrasse une vaguelette,

sur la terrine une vaillance,

sur la tessiture une valériane,

 

bref, il portait sur la tête une valise.

Elle était vide.

-          C’était, me dit-il, pour se mettre

 

à l’accessoire de la poignée,

à l’accélérateur de la poésie,

à l’académie de la podologie,

à l’abstinence de la pochade,

à l’absolutisme de la pluviosité,

à l’abscisse de la pluralité,

 

c’était pour se mettre à l’abri de la pluie.

Quand il ne pleut plus, nous sortîmes

 

du bleu,

du bled,

du blason,

du blanc,

du bla-bla,

du bitume,

 

du bistot,

et je le vis partir avec

 

sa vasodilatation sur le thermos,

sa variole sur la thérapie,

sa varape sur la théocratie,

sa vantardise sur la texture,

sa valvule sur la tétralogie,

(…)

 

sa valise sur la tête

 

en disquette de la stimulation du micron,

en dispense de la stérilité du microclimat,

en disjonction de la steppe du micmac,

en discrétion de la sténodactylo du miasme,

en discorde de la stéarine du meurtre,

en disciple de la statue du meuble,

 

en direction de la station du métro.

Pour moi,

 

cette justesse-là était discobole,

ce juron était dirigeable,

ce jurançon était direct,

cette jujube était diphtongue,

ce judo était dingue,

cette jouvence était dindon,

 

pour moi,

ce jour-là était dimanche.

 

 


À SUPPOSER

JACQUES JOUET


À supposer qu’on me demande ici d’occuper un espace réservé, - petit, suffisant – au moyen de quelques lignes et d’une idée derrière la tête, pour ne pas dire une pensée, qui aurait quelque chose à voir avec une activité toute de violence et de délicatesse contre la paresseuse et violente nature, activité dite en langue française « la lecture », je choisirais de ne pas entonner une quelconque déploration sur ce qui serait sa prétendue perte de vitesse et surtout de n’en pas chanter le moins du monde l’éloge autrement qu’en tentant de développer, en amont du moment où tes yeux la parcourent, une bonne phrase, constructible, construite et constructive, une seule phrase bien méandreuse, anastomosée, futile, dont la seule gloire ambitionnée serait de parvenir à ressembler, comme deux gouttes d’eau qui se ressemblent, à un corps intègre autant que traversé, sûr de lui-même autant que visité, non défensif, c’est-à-dire le contraire du hérisson des départementales qui ne connaîtra jamais de la roue que le côté le pire, et qui finira par s’imposer notamment par son rythme sans pareil qui ne sera définissable qu’en référence à un autre À supposer….

 


MÉLODIE EN SOUS SOL

IAN MONK


au septième un cadre dynamique si sûr de lui

au sixième un bricoleur qui commence à s’agiter

au premier un monsieur tout seul regarde la télévision

au cinquième un vieux couple qui s’emmerde grave

au deuxième y’a plus personne sauf la poussière

au quatrième une bande de jeunes commencent à décoller

au troisième une jeune maman couche ses trois enfants

au troisième elle chante une berceuse eux gueulent encore

au quatrième  on ouvre enfin le pack de kro

au septième la dynamique épaule gauche commence à picoter

au deuxième la poussière s’accumule sur les murs

au cinquième le mari traite sa femme de connasse

au sixième le bricoleur commence à planter les clous

au premier la télévision passe une musique de fesses

au troisième elle murmure doucement le petit s’enrage

au sixième le bricoleur continue à planter des clous

au cinquième la femme traite son mari d’enculé

au quatrième on met un tube de Public Enemy

au rez-de-chaussée on écoute une messe radiophonique

au septième il met un disque de relaxation transcendantale

au deuxième la poussière chatouille les narines des fantômes

au premier la télévision passe un claquement de fesses

au septième son épaule commence à creuser sa poitrine

au troisième elle murmure moins doucement le grand gueule

au sixième le bricoleur cloue cloue et cloue

au quatrième on remet un disque de Public Enemy

au cinquième le mari exige que la salope suce

au cinquième la salope l’envoie branler la bite

au deuxième atchoum les fantômes éternuent un bon coup

au quatrième on enlève le disque de Public Enemy

au septième son cœur s’emballe la musique stagne

au sixième les clous les clous les clous les

au troisième celui du milieu geint la mère pleure

au cinquième l’enculé sort sa perceuse et perce

au troisième les trois maintenant gueulent comme putes pourries

au deuxième ratchoum les mouches elles aussi éternuent fort

au sixième le bricoleur arrête et cogne par terre

au septième son cœur cogne maintenant entre ses orteils

au premier la télévision secoue la chair des fesses

au quatrième on danse chimiquement sur le Chemical Brothers

au quatrième entre morceaux on entend gens qui braillent

au premier l télévision montre les boutons des fesses

au cinquième la salope sort son moulin et mouline

au septième il entend ses tripes qui montent et

au troisième elle commence à s’énerver mais grave

au deuxième les mouches redescendent sur leur pique-nique

au sixième le bricoleur va chercher sa perceuse aussi

au sixième il perce pour faire chier lui aussi

au quatrième on remet Public Enemy encore plus fort

au deuxième la poussière redescend swoosh sur les mouches

au premier la télévision déclenche les boutons des fesses

au troisième elle crie ça suffit maintenant ça suffit

au cinquième on perce et on mouline encore encore

au septième le cœur réverbère dans l’appart entier

au septième Étienne Charon meurt d’une crise cardiaque

au sixième Jean Louis Duparc perce un cable électrique

au cinquième Pierrette et Albert font lit à part

au quatrième Jean Virginie Claude resniffent de la colle

au troisième Caroline passe à l’acte et cogne

au deuxième Madame Dussolier régale encore mouches et asticots

au premier Claude Martin jouit dans des fesses imaginaires.


 

 

ROMANS


 
 

ROMAN 1

 



 ROMAN 2

 


 ROMAN 3

 


 ROMAN 4

 


 ROMAN 5

 


 ROMAN 6



 ROMAN 7

 

 

 FIN.